Mardi 7 novembre dernier, la majorité de droite au Sénat a tranché. Après examen des amendements qui composent le projet de loi Immigration et Intégration, les décisionnaires étaient nombreux à voter en faveur d’une nouvelle disposition. Si l’Assemblée nationale suit les sénateurs, les étrangers qui séjournent en France pourraient bientôt devoir attendre 5 ans avant d’être éligibles à certaines aides sociales. Voici ce qui pourrait changer.
Quelles sont les décisions du Sénat au sujet des aides sociales délivrées aux étrangers ?
Le mardi 7 novembre dernier, le Sénat examinait les divers amendements qui composent le projet de loi Immigration et Intégration. Les sénateurs, dont la majorité est de droite, ont vite tranché au sujet des multiples propositions qui visent à retirer toujours plus de droits aux ressortissants étrangers qui séjournent en France. Si différents points ont été abordés, certains sont passés inaperçus.
Pourtant, ils ne manquent pas de provoquer l’ire de la gauche qui s’oppose aux décisions votées. Car elles pourraient effectivement plonger de nombreuses familles dans la précarité.
Vers un délai porté à 5 ans pour pouvoir profiter de certaines aides
Car si actuellement, les étrangers qui séjournent en France peuvent bénéficier de certaines aides sociales dès 6 mois de situation régulière sur le territoire, les choses pourraient changer. Même si les travailleurs étrangers cotisent tout autant que les salariés français, le Sénat, à travers son vote, compte bien compromettre ce droit.
En effet, ce ne sont pas moins de 4 prestations sociales, liées à la famille, au logement et au handicap, qui pourraient désormais ne plus être délivrées aux ressortissants étrangers, s’ils ne sont pas en mesure de justifier d’une présence en France datant d’au moins 5 ans.
Des décisions jugées inhumaines par la gauche
Si la mesure visant à éloigner l’éligibilité des ressortissants étrangers de droits sociaux a été votée haut la main par la majorité de droite qui siège au Sénat, elle n’est toutefois pas au goût de tout le monde. Le député écologiste Aurélien Taché et son homologue communiste Stéphane Peu ont d’ailleurs manifesté leur mécontentement en qualifiant tantôt le Sénat de « foire à la saucisse de l’inhumanité et de l’indécence », ou de « vents mauvais qui soufflent sur la France ».
Qui sont les étrangers lésés par cette mesure ?
L’obligation de justifier d’une présence en France datant de plus de 5 ans pour être éligible au versement de certaines aides sociales compromet l’intégration de nombreux ressortissants étrangers. Pire même, cette décision pourrait plonger des familles, ayant des enfants à charge, directement dans la précarité.
Les travailleurs étrangers et porteurs de handicaps étant dans l’incapacité d’attester d’une durée de résidence stable et régulière suffisante pourraient bien voir leurs revenus être considérablement réduits pendant plusieurs années si la mesure est définitivement adoptée.
Quelles sont les aides concernées par ce délai porté à 5 ans ?
Le vote qui a eu lieu le mardi 7 novembre dernier au Sénat concerne 4 prestations sociales liées à la famille, au logement et au handicap. Si lors de l’examen du projet de loi Immigration et Intégration l’Assemblée nationale adopte les décisions prises par les sénateurs, les aides suivantes pourraient ne plus être accordées aux étrangers les plus modestes avant 5 années de présence en France :
- l’aide personnalisée au logement ;
- les allocations familiales ;
- la prestation de compensation du handicap ;
- et le droit au logement opposable.
À l’heure actuelle, les étrangers sont nombreux à percevoir chaque mois le versement des aides citées ci-dessus. Ces dernières permettent de compléter de maigres revenus et d’aider leurs bénéficiaires à subvenir aux besoins de leurs enfants. La sénatrice socialiste Laurence Rossignol s’est d’ailleurs récemment indignée sur les réseaux sociaux, elle accuse notamment la droite de discriminer les enfants et d’organiser leur pauvreté.
Quelles autres mesures ont été votées par le Sénat concernant les étrangers ?
Si l’allongement du délai de résidence exigé pour permettre aux étrangers de bénéficier d’aides sociales indigne, ce n’est pas la seule mesure controversée qui a été votée par le Sénat au cours de l’étude du projet de loi Immigration et Intégration.
Le durcissement des règles pour accéder à un titre de séjour, la suppression de l’AME ainsi que la mise en place d’expulsions simplifiées sont autant de projets qui, s’ils sont adoptés par l’Assemblée nationale, pourraient compromettre et rendre plus difficile l’intégration des ressortissants étrangers en France.
La suppression de l’aide médicale d’État
Largement évoquée par les médias, la suppression de l’aide médicale d’État au profit d’une aide médicale d’urgence est envisagée par le gouvernement. En lieu et place d’un système de santé privilégiant l’humain, les bénéficiaires de l’AME, qui sont souvent des personnes particulièrement modestes, car en situation irrégulière sur le territoire, pourraient voir l’accès à certains soins médicaux, ne plus être pris en charge par l’Assurance maladie. Après un appel lancé par certains professionnels de santé, plus de 3500 médecins se sont toutefois dits prêts à désobéir si le texte est voté et à soigner gratuitement les patients sans papiers selon leurs besoins.
Le regroupement familial moins accessible aux étrangers
La fin de l’automaticité du droit du sol et la naissance de nouveaux critères pour pouvoir bénéficier du protocole de regroupement familial viennent compléter l’arsenal du Sénat pour réduire les dépenses en matière de politique migratoire. Des quotas sont aussi instaurés par le projet de loi tandis que l’aide au développement pourrait bien être désormais réservée uniquement aux pays qui facilitent les expulsions.
Des expulsions simplifiées
Par ailleurs, ces dernières seront désormais simplifiées. Si jusqu’alors, des mesures permettaient aux étrangers qui séjournent légalement en France d’éviter une expulsion en cas de délits ou de crimes condamnables d’une peine de prison de plus de 5 ans, ces droits sont désormais levés par le Sénat. Une menace à l’ordre public ou à la sûreté du pays pourrait bien donner lieu à un retrait de titre de séjour tandis qu’une simplification des expulsions est prévue.
Des régularisations plus difficiles à obtenir pour les étrangers
Si un espoir subsistait pour les sans-papiers d’obtenir enfin un titre de séjour grâce à l’exercice de fonctions au sein de secteurs considérés comme étant sous tension, ce dernier fût de courte durée. L’article 3 qui prévoyait une régularisation de plein droit a été troqué par la droite sénatoriale par l’article 4 qui évoque désormais des régularisations « exceptionnelles ».
Pour prétendre à la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle, il faudra aussi passer par un examen de langue et obtenir de bons résultats. La maîtrise du français sera effectivement l’une des nouvelles conditions requises pour obtenir un tel titre, qui offre en outre, la possibilité de séjourner en France pendant une durée allongée.
À partir de quand les mesures votées par le Sénat prendront-elles effet ?
Les mesures votées par le Sénat seront discutées, rectifiées et réorganisées prochainement par l’Assemblée nationale. Si les députés écologistes, socialistes et communistes s’opposent pour l’heure fermement aux durcissements des mesures qui composent le projet de loi Immigration et Intégration, l’ouverture du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et de ses pairs laisse à penser que les étrangers pourraient bien être lésés à l’issue de ces négociations.